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Camille Desmoulins, la voix de la Révolution

Article publié dans Axone n°8 – juin 2021
Camille Desmoulins fait partie des grandes figures de la Révolution française, aux côtés de Robespierre et de Danton. Avocat et journaliste, il va s’imposer, malgré son bégaiement, comme l’un des meilleurs orateurs de l’époque. Son engagement pour la liberté d’opinion et les Droits de l’Homme le mèneront de l’Assemblée jusqu’à la guillotine. Partez sur ses traces depuis Guise, sa ville natale…

De la Thiérache à Paris

© Arch. dép. Aisne, 6 Fi 074

Lucie-Simplice-Camille-Benoît Desmoulins est né à Guise, en Thiérache, le 2 mars 1760. Son père, était lieutenant civil du baillage royal de Guise et lieutenant général du baillage ducal. Boursier, Camille Desmoulins quitte la Picardie pour entrer au lycée Louis-le-Grand, à Paris. Il y devient ami avec un autre élève : Maximilien de Robespierre. Après une licence en droit, il prête serment au barreau de Paris et devient avocat en mars 1785. Toutefois, bègue et timide, il ne se montre pas à l’aise à l’oral, et a donc du mal à trouver des clients.

En mai 1789, Louis XVI convoque les États généraux à Versailles. La situation du royaume est catastrophique, tant sur le plan financier que politique. De nouveaux impôts sont nécessaires, et seuls les députés du Clergé, de la Noblesse et du Tiers État peuvent valider leur mise en place. Ceux-ci apportent les 60 000 cahiers de doléances rédigés par le peuple aux quatre coins du pays. Les revendications sont nombreuses. Parmi elles, le rejet de la monarchie absolue et le souhait d’une société plus juste, sans privilèges, reviennent régulièrement. Comme beaucoup, Camille Desmoulins se montre plein d’ardeur et d’enthousiasme : il en est persuadé, le monde va changer !

12 juillet 1789, la naissance d’un révolutionnaire

Dans les rues de Paris, on ne parle que de ça : le roi Louis XVI a renvoyé Necker ! Le 23 juin 1789, l’ancien banquier avait refusé d’assister à la séance tenue par le Roi. En cause, la volonté de celui-ci d’imposer des limites aux revendications de l’Assemblée nationale. Jacques Necker est le ministre des Finances à l’origine de la convocation des États généraux. Surnommé « le Ministre Patriote » par l’opinion publique, il a insisté pour doubler le nombre de députés du Tiers État. Les conséquences n’ont pas été du goût de tous…

Le lendemain, vers midi, de nombreux Parisiens sont réunis dans les jardins du Palais-Royal. Camille Desmoulins est parmi eux. Oubliant son bégaiement, il monte sur une table du Café de Foy et, un pistolet dans chaque main, s’adresse aux personnes autour de lui : « M. Necker est renvoyé ; ce renvoi est le tocsin d’une Saint-Barthélemy des patriotes : ce soir, tous les bataillons suisses et allemands sortiront du Champ-de-Mars pour nous égorger. Il ne nous reste qu’une ressource, c’est de courir aux armes et de prendre des cocardes pour nous reconnaître ! »

Acclamé de tous côtés, Desmoulins accroche à son chapeau un ruban vert, couleur de l’espérance. Pendant deux jours, les gens vont manifester dans les rues. Le mouvement prend de l’ampleur, jusqu’à devenir une véritable émeute. Le 14 juillet, la Bastille est prise d’assaut ! Plus tard, l’intervention de Camille lui vaudra d’être surnommé « L’Homme du 14 juillet ».

Dans le tourbillon de la Révolution

© Arch. dép. Aisne, 6 Fi 073

Après la prise de la Bastille, Camille Desmoulins fait paraître deux pamphlets, qui le feront connaître dans les cercles révolutionnaires. Il y traite de l’égalité dans la société, de justice et de liberté. En novembre de la même année, il fonde un journal Révolutions de France et de Brabant. Ses articles, incisifs et éloquents, remportent un grand succès. D’abord proche de Mirabeau, il se tourne bientôt vers des idées plus radicales. Il rejoint le club des Cordeliers, la société des Amis des droits de l’Homme et du citoyen, aux côtés de Danton.

En 1792, il lance La Tribune des Patriotes. Ses différents textes entretiennent sa popularité et font de lui l’une des voix majeures de la Révolution. Il est également nommé secrétaire général au département de la justice. L’année suivante, il est élu député de Paris à la Convention. Il vote la mort du Roi, qui sera exécuté le 21 janvier 1793. Au même moment, il crée une troisième revue : Le Vieux Cordelier. Il y revendique la liberté de la presse et s’oppose à la Terreur. Cette prise de position lui vaut d’être arrêté le 31 mars 1794, sur ordre de Robespierre. Il est guillotiné à Paris le 5 avril suivant, le même jour que Danton et d’autres « Indulgents ».

Lucile, le grand amour de Camille

© Wikimedia Commons

Ils étaient passionnément amoureux : Lucile et Camille Desmoulins font partie des couples mythiques de la Révolution française. Pendant des années, le journaliste a courtisé cette jeune fille issue de la bourgeoisie parisienne. Cependant, la situation précaire de Desmoulins ne jouait pas en sa faveur auprès du père de Lucile, commis à l’administration des finances. Avec le lancement de son premier journal, il acquiert enfin notoriété et argent. Il épouse finalement sa bien-aimée le 29 décembre 1790 à l’église Saint-Sulpice.

Le couple s’installe au 2, rue du Théâtre-Français. Toute leur vie, ils échangeront de nombreuses lettres d’amour. Desmoulins continue d’haranguer les foules, tandis que Lucile tient un salon où elle diffuse les idées de son mari. Lorsque Camille est arrêté, elle écrit à Robespierre, son ami d’enfance, pour le faire délivrer : sans succès. De sa prison, Desmoulins lui écrit : « Les verrous qui me séparent de toi ont vaincu toute ma fermeté d’âme (…) Envoie-moi de tes cheveux que je les mette contre mon cœur. » Sur l’échafaud, il murmure une dernière fois le prénom de sa femme. Accusée d’avoir voulu le faire évader, Lucile est arrêtée à son tour et condamnée à mort. Elle est guillotinée le 13 avril 1794. Face à ses juges, elle s’écria : « Ô joie ! Dans quelques heures, je vais donc revoir Camille ! »

Si son nom a fini par s’effacer un peu dans l’Histoire, Camille Desmoulins est toujours présent à Guise. Une statue a d’ailleurs été érigée en 1890, sur la place d’Armes. À deux pas, l’Association Camille Desmoulins a mis en place un musée dédié à ce « patriote picard », comme il se désignait lui-même. De quoi se replonger avec passion dans son combat pour la liberté…

Axone numéro 8
Retrouvez cet article dans Axone n°8 – juin 2021
Photo de l’article : ©Axone

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