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La cuve Saint-Vincent, l’écrin de verdure médiéval

Article publié dans Axone n°8 – juin 2021
Nichée au creux des bras de la ville haute, la cuve Saint-Vincent s’ouvre comme une parenthèse verte en pleine ville. Ce lieu de promenade atypique témoigne du passé viticole de la cité médiévale. Empruntez les grimpettes de la Montagne couronnée pour découvrir l’envers de ce décor apprécié des habitants comme des touristes.

Quand Laon était la capitale des vins…

© Arch. Dép. Aisne, E-dépôt 401 DD25.

Au xiie siècle, Laon est toujours un lieu de pouvoir et abrite au moins 10 000 habitants. L’ancienne capitale des Carolingiens est une ville prospère qui connaît une période de construction intense, avec, notamment, le chantier de la cathédrale Notre-Dame de Laon. En 1128, le roi Louis VI le Gros accorde aux habitants une charte communale. Ce document leur donne une nouvelle forme d’autonomie et met fin au conflit qui les opposait à l’évêché depuis de nombreuses années.

L’évêché de Laon est l’un des plus puissants du royaume. Les évêques successifs reçoivent à leur table des invités prestigieux, dont les rois de France, et ont donc un rang à tenir. Posséder un vignoble indique justement un statut social important. C’est la raison pour laquelle les religieux ont commencé à cultiver des vignes sur les versants de la cuve Saint-Vincent.

Jusqu’au xviiie siècle, le vin produit à Laon est l’un des plus réputés d’Europe. Grâce à la proximité des voies marchandes et des ports de la mer du Nord, il est exporté dans les Flandres et jusqu’à la cour du Roi d’Angleterre. En France, il est particulièrement apprécié et est même servi lors des fêtes qui suivent le sacre d’un roi, à Reims.

La production viticole s’achève à Laon au xixe siècle. Le chemin de fer permet désormais d’importer des vins du Languedoc ou du Bordelais. En 1861, une épidémie de phylloxéra ravage les vignes partout en France. Si elle est finalement vaincue, les cultivateurs laonnois se tournent désormais vers le blé et la betterave à sucre.

Un panorama remarquable

La cuve Saint-Vincent est le point de départ de plusieurs grimpettes, ces sentiers en pente qui relient la ville haute à la ville basse. La rue des Vendangeoirs s’ouvre ainsi sur le Chemin des Froids-Culs et celui des Fonds Saint-Jean, qui rejoint le sentier des Chenizelles.

Celui-ci débouche sur la porte des Chenizelles, un bâtiment fortifié datant du xiiie siècle. Conçue pour les piétons, cette porte donnait accès à la ville haute. Autrefois, elle comportait une herse tombante, des vantaux et un assommoir. Restent aujourd’hui ses tours élancées, enserrées dans la muraille.

Plus bas, se trouve le promontoire de la Madeleine, avec l’ancienne abbaye Saint-Vincent. Fondée vers 580, celle-ci est sans doute la plus ancienne fondation monastique de Laon. Au cours de son histoire, elle a été plusieurs fois incendiée, notamment par les Vikings, en 882, et par les troupes d’Édouard III d’Angleterre, en 1359. En juin 2008, un nouvel incendie la ravage, détruisant la toiture et les planchers.

Tout au sud de la cuve, la batterie Morlot est un vestige militaire du xixe siècle. Elle fut construite en 1878 afin d’établir des communications avec les autres forts du secteur à l’aide d’un télégraphe optique. Celui-ci fonctionnait avec une lampe à pétrole et un jeu de miroirs. Utilisant la lumière du soleil, il permettait de faire passer des messages indétectables pour les ennemis situés en contrebas. Depuis cette butte, les promeneurs ont la joie de découvrir une vue exceptionnelle, s’étendant de la ville basse jusqu’au Chemin des Dames.

La cuve Saint-Vincent est une étape incontournable lors d’une randonnée à Laon. Et, si la ville ne produit plus de vin, les curieux peuvent toujours déguster une chope d’hypocras local, mélange de vin rouge et d’épices !

Retrouvez cet article dans Axone n°8 – juin 2021
Photo de l’article : ©Axone

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